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Qui est Prosper Avril, ce général déclaré persona non grata par la société civile haïtienne?

Cette année, les organisateurs de Livres en folie ont annoncé, en grande pompe, la participation de l’ancien général putschiste, Prosper Avril comme invité d’honneur. En réaction, une bonne partie de la société civile haïtienne, notamment des écrivains, des maisons d’édition et des artistes ont déclaré Prosper Avril personne indésirable tout en menaçant de boycotter la 29e édition de l'événement pour protester contre sa présence.



Prosper Avril est un ancien général des Forces armées d’Haïti (FAD’H) qui a servi pendant longtemps la dictature des Duvalier. De 1967 à 1986, le général occupait, au palais national, la question de la logistique en équipement et en armement. Il était même, à un certain moment, l’un des conseillers de Jean Claude Duvalier, le dictateur dont les principales caractéristiques de son régime étaient la corruption et les crimes contre les droits humains. En dépit de la chute des Duvalier en février 1986, le général n’a pas laissé ses privilèges au pouvoir. Il fut nommé membre du Conseil National de gouvernement (CNG) par Jean Claude Duvalier avant même le départ du dictateur pour l’exil. Le CNG d’alors comprenait six membres : le général Henri Namphy, le colonel Max Vallès, Alix Cinéas, Me Gérard Gourgue qui a démissionné peu après, plus le général Avril.


Il faut souligner que le général Prosper Avril avait été limogé, lui et deux de ses amis, Vallès et Cinéas. Après le départ de maître Gourgue qui était, aux yeux de la population, l’unique figure crédible du CNG, les autres membres avaient décidé de se débarrasser des figures les plus douteuses de l’équipe et le général Prosper Avril était parmi celles-là. Il devait attendre le coup d’État de 1988 pour reprendre le pouvoir.


Un dictateur putschiste


Prosper Avril s’est accaparé du pouvoir le 17 septembre 1988 après un coup d’État orchestré contre le général Henri Namphy. On lui a reproché d’avoir mené d’un bras de fer le pouvoir en poursuivant des actes de tortures, d’arrestations illégales et d’autres cas flagrants de violation des droits humains, pratiques du gouvernement des Duvalier. Avril a dû faire face à de grandes contestations, mais aussi, a-t-il mené des assauts contre ses opposants. Son gouvernement militaire aurait été l’une des figures les plus complètes du régime sanguinaire dont il était un membre actif. Dans la nuit du 1 au 2 avril 1989, il a essuyé un coup d’État manœuvré par des officiers de l’armée. Cette tentative n’a pas réussi. Prenant la parole à l’occasion, il glorifia les soldats de la caserne Dessalines et du corps de léopards, des officiers et sous-officiers d’avoir œuvré contre cette tentative de coup d’État. Il exerça son pouvoir envers et contre tout.


Mais, les protestations allaient continuer avec le soutien d’une coalition de partis politiques. Ne pouvant pas résister, il a démissionné et remis le pouvoir entre les mains du général en chef de l’armée, Hérard Abraham, le 10 mars 1990. Il partit pour l’exil aux États-Unis. Des Haïtiens, victimes de la main de fer du général, l’ont poursuivi là-bas. Il aurait laissé les États-Unis pour se rendre en République dominicaine en vue d’échapper à la décision d’un juge.


Prosper Avril a passé environ trois ans en dehors du pays avant de revenir en 1993. Comme d’autres présidents, à son retour au pays, le général a mené une vie très discrète jusqu’à son arrestation le 26 mai 2001. Cette arrestation a fait échos au point qu’Amnesty International l’ait salué le 6 juin 2001. L’arrestation du général Prosper Avril pourrait marquer une avancée de la justice haïtienne dans son combat contre l’impunité, a écrit Amnesty International. L’institution a ajouté que la gravité des violations des droits fondamentaux commises lorsque le général Avril était au pouvoir, de son coup d’État de 1988 à son départ en mars 1990, ne peut être ignorée.


Prosper Avril a été libéré en 2004 et a repris sa carrière d’écrivain. Lors d’une interview, il a annoncé son intention de reprendre ses activités politiques comme avant.


Jean Robert BAZILE


Ce projet de contenus a eu le support de l’IFDD/OIF.

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